Somewhere

J’ai parlé de Somewhere dans ma note sur Twixt, alors il me semble que c’est le bon moment pour la ressortir.

Note initialement publiée le 8 janvier 2011

Je suis dubitative. Si tu ne veux pas de spoilers (ou si ça te fait chier de lire), tu peux aller directement en fin de note pour le résumé.

Somewhere est un film étrange, très atypique. Extrêmement audacieux au point qu’il finit par pêcher par son audace.

Johnny Marco est un acteur américain à succès. Belle gueule. Il vient de terminer un film. Et ses journées sont d’un ennui mortel. Entre deux obligations professionnelles, qui lui sont dictées par une voix féminine au téléphone : « tu as rendez-vous au studio pour les effets spéciaux, une voiture t’attend en bas », « tu dois être à Milan dans deux jours »…, il s’emmerde ferme dans sa suite de l’hôtel Château Marmont à L.A. Il fait venir des danseuses en tenue légère dans sa chambre, organise des fêtes, dort, fume, fait des tours de Ferrari, s’envoie en l’air avec n’importe qui. Un jour, son ex lui annonce qu’elle veut prendre un peu de temps pour elle et lui confie la garde de leur fille de onze ans, Cleo. Les quelques jours qu’ils vont passer ensemble vont être une révélation pour Johnny.

C’est un film concept. On y traite de l’ennui. Donc on y voit donc beaucoup de plans fixes longs. On y voit des scènes sans intérêt, si ce n’est un intérêt photographique et esthétique. Le premier plan du film annonce la couleur : la caméra est posée sur le bord d’un circuit automobile et on entend une voiture y rouler. La voiture passe plusieurs fois devant la caméra, le reste du temps elle est hors champ, et elle finit par s’arrêter plein cadre. Le ton est donné.

Ce que va filmer Sofia Coppola, c’est le quotidien de cet acteur. Et le quotidien, qu’on s’appelle Bernard ou Johnny Marco, c’est parfois très chiant. Le temps passé en bagnole. La clope qu’on fume tout seul sur son canapé le soir. Le documentaire à la con qu’on regarde jusqu’à pas d’heure. Ce qu’a voulu démontrer la réalisatrice, c’est qu’être une star internationale n’est pas forcément ce qu’on croit. Une star internationale, c’est parfois un homme immature. Immature à la base, et aussi infantilisé par toutes les personnes qui gravitent autour de lui et qui font tout à sa place. C’est souvent quelqu’un qui est obligé de vivre cloîtré pour échapper aux photographes et aux fans hystériques.

L’arrivée de Cleo va venir chambouler le quotidien de Johnny. Le quotidien de Johnny chamboulé par le quotidien de Cleo. Parce que Cleo, à onze ans, n’a pas une vie palpitante non plus. Elle fait du patin à glace, joue à la Wii, prépare son séjour en colo. Mais pour Johnny, c’est une bouffée d’oxygène. Le quotidien peut être chiant mais aussi parfois source de bonheur tout simple.

Je crois qu’une des grandes forces de Coppola, c’est le casting. Stephen Dorff est…je sais pas. Je suis amoureuse. Il a beau avoir dans ce film un paquet de défauts rédhibitoires, on ne peut s’empêcher de le trouver sympathique et totalement craquant. Enfin moi, j’ai craqué. Quel bel homme ! C’est un acteur que je n’avais pas vu depuis des millénaires. Je me rappelle de lui il y a un certain nombre d’années mais je ne sais plus dans quel contexte. Il était déjà beau gosse mais là…J’avoue que c’est probablement la raison pour laquelle je ne me suis pas endormie pendant le film. Quant à la petite Elle Fanning…la voilà sur les traces de sa grande sœur Dakota. Fraîche, diaphane, naturelle. Exactement dans la lignée des actrices-Coppola. Blonde aux yeux bleus, teint de porcelaine.

Ce qui me rend dubitative dans ce film, c’est le scénario. Le coup de l’acteur à succès qui s’emmerde dans un hôtel, il me semble qu’elle nous l’a déjà joué quelque part non ? Mhh ? Où ça ? À Tokyo ! Ah oui ! Lost in translation ! C’est mon film préféré en plus…Donc évidemment autre lieu, autre personnage, autres enjeux, mais en substance…Coppola nous parle encore de ces pauvres acteurs richissimes qui ne savent pas quoi faire de leurs dix doigts quand leur agent ne leur donne pas d’ordre. C’est un peu gênant car c’est le quatrième film de Coppola et seulement son deuxième scénario original…Donc deux adaptations, une historique, une littéraire, et deux créations qui traitent exactement du même thème. Il va peut-être falloir innover un peu.

Autre souci dans ce film, les longueurs. Les plans séquences interminables. C’est évidemment voulu, pour illustrer concrètement l’ennui et le désœuvrement, mais c’est parfois un peu too much. Certes la photographie est très belle mais ça ne fait pas tout. J’aime pourtant particulièrement les films qui font la part belle aux longs beaux plans qui permettent de profiter d’un décor, du jeu d’un acteur, mais point trop n’en faut.

D’autant que, énorme déception, la musique est quasiment absente du film. On nous collait partout des « BO de Phoenix ». Mensonge éhonté ! Ils n’ont fait que la musique du générique. Et encore, c’est tiré de leur dernier album (Love like a sunset). On a bien quelques musiques additionnelles ici ou là mais rien d’aussi recherché que dans Virgin suicides ou Lost in translation. Je ne me souviens plus trop de Marie-Antoinette mais je crois que c’était bien recherché aussi. Ça me déçoit, pas tant parce que je n’ai pas la dose de Phoenix que j’espérais, mais plus parce que pour moi, Coppola, c’était la garantie d’avoir un film beau à voir et à entendre, avec de vrais choix originaux.

En résumé !

Les plus :

  • des acteurs aux visages extraordinaires, qui en disent long

  • une photographie soignée, lumineuse

  • un film-concept audacieux et minimaliste

Les moins :

  • l’ennui matérialisé à outrance

  • l’absence de bande-son de qualité

  • un scénario déjà vu

 

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