Comment résumer un tel roman ? Sandrine Collette, dont c’est le premier livre que je lis, nous entraîne dans une sorte de roman d’anticipation apocalyptique avec un point de vue ultra-subjectif.
L’histoire se passe à notre époque, il y a des voitures, des téléphones portables… Corentin est un jeune homme ayant grandi à la campagne auprès d’une grand-mère protectrice, sa mère ne voulant pas de lui. Alors qu’il vit à la “Grande Ville” et mène une existence comme en mènent beaucoup d’étudiants, faite de cours et de soirées éthyliques, il arrive quelque chose. Quoi ? On n’en saura jamais rien. Mais alors qu’il était sous terre avec quelques amis, une catastrophe est arrivée en surface. C’est peu de le dire. Il n’y a plus rien, plus âme qui vive, tout a brûlé, les gens, les animaux, les voitures, tout. Hagards, les étudiants survivants se séparent et vont tenter de retrouver leurs proches. Corentin va donc partir seul sur les routes calcinées à la recherche du village d’Augustine, sa grand-mère. Un long périple de souffrances. Pour quel but ? Quel destin ?
Dans ce type d’histoire, j’ai tendance à analyser ce qui est crédible ou non, c’est un peu mon défaut. Il y a donc quelques éléments qui me font tiquer. Évidemment on ne sait pas de quelle Grande Ville il s’agit mais des souterrains avec des ossuaires… Bref, s’il s’agit de Paris, quid des milliers de personnes qui se trouvaient dans le métro et qui auraient aussi échappé à “la chose” ? Ensuite, Corentin survit grâce à la nourriture volée dans les magasins et les maisons mais puisque tout à brûlé, que les voitures ont fondu, comment peut-il encore trouver conserves et bouteilles d’eau, sacs de farine ? Au musée d’Hiroshima, des objets sont exposés dans les vitrines, vestiges prélevés après le passage (éclair) de la bombe atomique. Bon ben les bouteilles de verre avaient bien gondolé. Quand le verre fond, en principe le reste aussi. Donc bon… soit, Corentin trouve plein de nourriture. Et c’est tant mieux sinon le roman aurait fait 50 pages. Bref, passons ce point.
Ce qui est intéressant c’est la façon dont Corentin va organiser sa vie “après”. C’est aussi la vision d’une nature morte, sans arbres, sans fleurs, sans insectes, sans eau potable, d’un ciel gris, de saisons chamboulées… et ça, c’est certes de la fiction mais bizarrement on commence à entrevoir à quoi ça pourrait ressembler. En poussant le curseur à l’extrême, Sandrine Collette nous propulse dans un monde où la nourriture manque et on a de la chance car il n’y a certes presque plus rien à manger mais presque tout le monde est mort. Tant mieux pour les survivants. On n’imagine que trop bien un monde où les récoltes s’amenuisent, où l’eau cesse de couler dans le lit des rivières, où les insectes et les animaux disparaissent. Ce monde c’est le nôtre et nous sommes 8 milliards. L’apocalypse ne nous tombe pas dessus en un éclair, c’est bien pire que ça : on la voit venir et on continue comme si de rien n’était. D’ailleurs, Corentin continue sa vie, du moins une nouvelle vie, un peu comme si de rien n’était. Les rituels, la quête de nourriture, la protection contre le froid… toute existence est régie par ses petites habitudes, aussi triviales et fastidieuses soient-elles, dont on n’a pas envie de sortir, sauf à y être acculé. Ainsi va l’humanité.
Dans ce monde gris et sans perspectives d’avenir, Sandrine Collette insuffle de l’espoir, qui prend la forme de chiens, d’enfants, d’instinct de survie, de bourgeons. J’aimerais dire que l’humanité au sens noble du terme se relève la tête haute mais comme d’habitude, elle vient semer terreur et destruction. La vie post-apocalypse vaut-elle la peine d’être vécue ?
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