La nouvelle exposition de la petite galerie In Extenso change littéralement du style de la précédente, consacrée à un seul artiste, Jakup Auce. Cette fois-ci, c’est une carte blanche accordée à Documents d’artistes, sorte de Who’s who des artistes de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur.
Non sans une certaine dose d’humour, ils ont missionné David Ancelin, Patrice Carré, Stéphane Lecomte et Pascale Mijares pour exporter la French Riviera sur le plateau volcanique clermontois. Attachez vos ceintures, on part en vacances au soleil !
Avant que l’expo ne soit en place, certains supports de communication circulaient déjà et je mourais d’envie de voir ce sac à dos et son palmier. Intitulée « Out of Africa », cette création de David Ancelin me parle. Je la trouve drôle, esthétique, et pleine de sens. Le voyage caricaturé, le touriste réduit à sa plus simple expression. Au-delà de l’œuvre d’art, je trouve l’idée de « pot » très intéressante et déclinable à l’infini.
Juste à côté, des formes connues de tous. Le célébrissime « Nu bleu » de Matisse revisité à coups de ciseaux crantés. Pour le bleu, Patrice Carré a préféré des photos d’eau de piscine. Et parce que la piscine appelle inévitablement le barbecue, une troisième œuvre propose des photos de viande. J’assume totalement la référence au barbecue, qui d’ailleurs est assez intéressante car je ne me baigne jamais dans des piscines et je ne fais presque jamais de barbecue. Pourtant, les images de piscine et de viande ont immédiatement appelé le barbecue dans mon esprit manifestement infesté de clichés de vacances. J’espère que Matisse ne se retourne pas trop dans sa tombe. Ce n’est de toute façon pas pire que les innombrables reproductions commerciales qu’on voit partout. J’en ai même une (dois-je le dire?) de son « Nu aux oranges » sous forme de carte postale affichée (avec plein d’autres cartes) dans mes toilettes. Là, je pense qu’il commence vraiment à s’agiter dans sa tombe, ce pauvre Henri. Bref, cette œuvre de Patrice Carré porte également en elle une violente critique de notre société de consommation, et positionnée juste à côté du sac à dos-palmier, l’ensemble forme une belle brochette (thématique barbecue toujours) de clichés.
Presque au milieu de la pièce trône un chariot de ménage. Je dois dire que le découvrir lors du vernissage, où il y avait un petit peu de monde, a été une expérience intéressante. Beaucoup de gens ont dû penser que c’était un oubli (franchement je n’étais pas loin de le penser). Un dernier coup de balai avant l’ouverture au public, on est dérangé par le téléphone et voilà, le chariot est encore là quand les invités arrivent. J’ai même cru que des gens allaient le pousser dans un coin. Mais quand on s’y attarde, ce chariot n’a rien d’habituel. Tous les accessoires sont immaculés : gants, serpillière, sac poubelle… et surtout, ils sont décorés, customisés, avec des broderies fines. Autant les deux œuvres précédentes portaient sur elle une signification évidente en rapport avec le titre de l’expo, autant celle-ci m’a demandé un peu d’effort d’imagination. « Ma mob » de Pascale Mijares personnalise, rend unique et visible ce qui habituellement ne l’est pas. On peut par exemple penser aux armadas de femmes de ménage dans les grands hôtels de la côte, à toutes ces petites fourmis laborieuses qui veillent à la bonne présentation du « beau ».
Enfin, l’œuvre de Stéphane Lecomte est constituée de plusieurs collages numériques. Véritable collection de clichés criards sur tout ce qu’on peut imaginer de la Côte d’Azur. Les palmiers (encore eux), les stars, les seins nus… En accord avec la thématique, c’est pourtant l’œuvre qui m’a le moins interpellée. Trop évidente, trop facile peut-être.
Un grand merci au jeune homme (dont je n’ai pas pensé à prendre le nom) qui nous a reçus et fourni des explications sur les œuvres ainsi que sa vision personnelle de l’expo. Je le dis et le redis, n’hésitez pas à pousser la porte des expositions d’art contemporain, il se trouvera toujours quelqu’un pour vous accompagner dans la lecture des œuvres.
J’en profite pour signaler la sortie de La belle revue 2013, revue gratuite (papier et online) et rétrospective des expos d’art contemporain en centre-France. Non exhaustive bien sûr, elle revient sur des moments phares de l’année passée. Accessoirement, elle me donne envie d’aller à Vassivière pour visiter le Centre international d’art et du paysage. Vassivière étant un vaste lac et une base de loisirs, le déplacement est à envisager à la belle saison histoire de flâner un peu dans le coin.
L’exposition French Riviera est en place jusqu’au 1er mars 2014 et c’est gratuit.
Je remarque avec plaisir la part belle que tu fais dans tes aventures, à l’art contemporain, qui est souvent boudé ou tout bonnement démoli par des blogueurs méfiants ou apeurés. Tu sais donner envie de voir, d’essayer sans préjuger, en partageant ton ressenti. C’est agréable et communicatif. Et comme tu le précises, en cherchant bien, il y a toujours quelqu’un pour accompagner le visiteur dans ces lieux d’exposition. Merci.
@laurent : merci ;) il faut dire aussi que les lieux sont accessibles, gratuits, pas impressionnants comme peuvent l’être certains grands musées… ça aide à pousser la porte ! Et parfois je me moque, comme beaucoup de gens, à coups de « pfff mais moi aussi j’peux l’faire ». Ce qui rassure, c’est que les personnes présentes pour guider reconnaissent parfois elles-mêmes ne pas avoir les clés pour interpréter certaines œuvres, ou y être insensibles. Ca déculpabilise !