Je vous ai déjà parlé de Lucie Brasseur à l’occasion de la conférence donnée lors des 48h du polar, au sujet du numérique et de l’édition. Je me suis procuré son roman, édité via Bookly.fr, attirée à la fois par le concept et par le titre.
Avant de vous dire ce que j’en ai pensé, je tiens à rappeler quelques trucs que j’ai appris pendant la conférence. Il ne s’agit pas d’une maison d’édition comme les autres. Les auteurs proposent leur manuscrit et les internautes souscrivent au projet jusqu’à ce que le minimum soit atteint pour lancer l’impression. Les souscripteurs, une fois le livre édité, touchent des royalties sur les ventes. Les auteurs ne sont pas accompagnés lors de la phase d’écriture et de relecture, comme c’est le cas dans une maison d’édition traditionnelle. Le manuscrit nous est donc livré brut, tel qu’il a été écrit par l’auteur.
Bon, maintenant, vous avez compris que je ne vais pas dire que du bien de ce roman…
Amy a la petite trentaine, elle est assistante dans une boîte qui fait de la vente en ligne et elle s’emmerde ferme. Elle aime lire, son rêve secret c’est l’écriture d’un roman, et elle méprise ses collègues de travail, leurs conversations débiles à la machine à café et leur pitoyable esprit corporate. Alors lorsque son DRH lui propose un projet « social » dans le cadre de la nouvelle politique de l’entreprise, elle saute sur l’occasion. Elle ira dans un centre d’accueil pour SDF, le Galaxie. L’occasion de se rendre utile et pourquoi pas d’accumuler des notes pour son futur roman. Au Galaxie, elle fait la connaissance de la directrice, Monique, personnage écorché par la vie. Les SDF, elle leur parle peu, ils restent entre eux, échoués là le temps de reprendre quelques forces avant de repartir à la rue. Un jour, une jeune SDF, Mélanie, lui raconte son parcours. Moins cabossée que ses collègues de la rue, elle a encore un peu d’espoir de s’en sortir. Quelques jours plus tard, elle est retrouvée assassinée. C’est alors qu’entre en scène Thomas, le beau lieutenant de police, love at first sight. Un premier meurtre, puis deux, puis… Amy semble semer la mort autour d’elle et l’enquête dans ce milieu opaque n’est pas des plus faciles.
Bon. Beaucoup de blabla dans ce roman. J’ai cru que ça ne durerait que le temps des premiers chapitres, le temps de poser le contexte mais en fait non. Des digressions à n’en plus finir, Lucie Brasseur semble laisser sa plume vagabonder, elle se fait plaisir mais le lecteur s’impatiente. C’est un polar, on veut avancer dans l’intrigue et vite. En fait, sa façon d’écrire m’a fait penser à un blog. Aux grandes heures des blogs d’il y a quelques années. Attention, rien de péjoratif dans mes propos, loin de là. C’est pas désagréable à lire, on sent qu’elle a des choses à raconter sur le monde du travail, sur la famille, sur la solitude des grandes villes… mais ça tombe un peu mal dans un thriller.
Ensuite… un festival d’invraisemblances. Le lieutenant de police qui la laisse enquêter avec lui, la vie rocambolesque de ce dernier, le dénouement capillotracté… autant l’écriture est fluide, autant la construction de l’intrigue et des personnages fait plutôt factice et laborieux.
Enfin… pourquoi auto-spoiler la fin du roman ? Dès le début on devine qui est le meurtrier ! Du coup j’ai passé tout le livre à attendre les explications, puisque j’avais la certitude de son identité. Et ce n’est pas grâce à ma super perspicacité, mais à des éléments soulignés par l’auteure elle-même. Pas trop compris le concept…
C’est là je pense qu’une maison d’édition aurait pu permettre à ce roman d’être un bon premier roman. Des conseils sur l’architecture de l’histoire, et des coupes franches dans les descriptions et digressions auraient été bienvenus.
Bon mais je me rends compte qu’écrire un roman n’est pas aussi simple qu’il n’y paraît, que l’accompagnement par des professionnels n’est pas forcément fait pour calibrer une œuvre ou la dénaturer. Et reste que j’ai préféré, de loin, lire ce roman qu’un Guillaume Musso. Il avait le mérite d’être frais et spontané.
Sans avoir lu le livre qui ne me faisait pas du tout envie, je reste assez sceptique sur les autoéditions ou ces systèmes d’édition en l’absence d’un professionnel qui soit là pour conseiller. C’est la base du métier d’éditeur. Cette charmante auteure ne semble parler de son livre que par la façon dont il a été publié, et moins de l’intrigue (et pas seulement lors de la conférence). Ça fait un peu trop marketing pour Corn Flakes à mon goût.
@Laurent : si tu rajoutes à ça qu’elle a pas arrêté de draguer Michel Jacquet pour entrer au catalogue Jarjille et gagner plus de droits d’auteur ;)
Après on a bien compris aussi qu’elle était une start-upeuse de longue date et que c’était son truc, la geekerie. Mais en toute honnêteté je n’ai pas trouvé son style désagréable.
Et après Galak l’autre jour, tu parles de corn flakes, va falloir arrêter avec ces placements produits peu discrets ! ;)
Désolé, je suis dans ma période junk food. Mais j’essaie d’arrêter ;-)
je serais toutefois curieux Laurent de voir ce que pourrait donner de l’auto-édition de cornflakes :-)
@gidehault On peut commencer par dessiner soi-même les boites. Mais pour ce qu’on mange à l’intérieur, je ne sais pas trop.