Avant d’attaquer ce billet, j’ai relu celui que j’avais écrit à l’occasion de son dernier roman, Peine perdue, que j’avais aimé. Je ne suis malheureusement pas aussi positive pour ce nouveau roman, La renverse. Alors oui, bien sûr, j’aime toujours autant le style d’Olivier Adam et j’aime toujours autant sa façon de sonder les émotions les plus profondes et parfois les plus répugnantes, ce qui fait que j’ai lu ce roman avec intérêt malgré tout. Mais sur le fond… je n’ai pas adhéré à cette histoire de scandale politico-médiatico-sexuel.
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Antoine, planqué quelque part au fin fond de la Bretagne, mène une vie faite de peu. Solitaire, taciturne, il cache au fond de lui un vieux secret de famille, jusqu’au jour où un certain Jean-François Laborde est annoncé mort par les médias. Voilà le secret qui remonte à la surface, charriant sa vase malodorante et poisseuse. Plusieurs années auparavant, Laborde… voilà celui par qui le scandale est arrivé. Homme politique d’envergure nationale et maire de la commune d’Antoine, il est accusé d’avoir violé deux femmes, avec la complicité de sa maîtresse… qui n’est autre que la mère d’Antoine. Lui et son frère, encore adolescents, vont devoir faire face à un déferlement d’horreurs, et à la destruction de leur famille.
Olivier Adam nous plonge au coeur des émotions de cet adolescent, à la fois suffisamment adulte pour comprendre les choses, mais encore trop jeune pour prendre le recul nécessaire et s’affranchir du qu’en-dira-t-on, et pour protéger correctement son petit frère. Un tel scandale est également l’occasion de découvrir, avec effroi, la part d’ombre de ses parents et leur incapacité à gérer la détresse de leurs enfants. Le Antoine adulte doit faire face, et pour toujours, aux questions restées sans réponse, aux doutes, y compris sur sa propre mémoire, et à la culpabilité d’avoir abandonné sa propre famille, pour son propre bien.
Est-ce qu’Olivier Adam s’inspire de faits réels dans ce roman ? Sûrement un peu, un mélange de plusieurs affaires. Mais ici, l’intrigue politique et ses conséquences ne sont qu’une toile de fond pour les protagonistes. Si nous avons oublié la plupart des scandales, si nous les avons rangés dans notre mémoire au chapitre des anecdotes croustillantes, Olivier Adam nous rappelle avec cruauté que des êtres innocents payent toute leur vie pour les frasques de leurs proches, que des familles ont explosé de façon irrémédiable, qu’un coupable, même innocenté, reste coupable toute sa vie aux yeux de l’opinion publique et pire encore, aux yeux des proches qui eux, connaissent le fin mot de l’histoire.
Je me rends compte que j’arrive malgré tout à parler de ce roman de manière positive, car je le répète, l’écriture d’Olivier Adam est riche de subtilités, sensible à l’extrême. Toutefois ce scandale sexuel m’a un peu barbée, je ne saurais trop dire pourquoi. Peut-être trop artificiel, par rapport au reste du roman. Une construction qu’on devine échafaudée brique par brique, pour qu’elle soit crédible, mais qui au final ressemble à un décor de carton-pâte. Restent les mots d’Antoine, son histoire, ses souvenirs, ses contradictions, un flou dans lequel on se perd volontiers avec lui.
“Les oiseaux gueulaient comme si la nuit allait les emporter”