Je n’ai lu que de bonnes critiques au sujet de ce dernier roman d’Erri de Luca et pourtant, je m’admets assez déçue. Oh sur la forme, rien à redire, le style est là, la souplesse des phrases, leur poésie, leur fulgurance parfois… C’est sur le fond que je me suis sentie inconfortable, je ne voyais pas où tout cela nous menait et à la fin, je me suis trouvée dans une impasse. Je n’ai pas compris ce livre, son intention, le rapport entre les faits.
Il s’agit ici de l’histoire d’un homme, vieillissant, qui vit au pied des montagnes italiennes et qui, sous l’afflux des migrants, décide de devenir passeur. Il prend l’argent de ces malheureux et une fois acheminés de l’autre côté de la frontière, il leur rend. Cette générosité finit par se savoir, notre homme se retrouve harcelé par les médias et méprisé par les autres passeurs. Alors il fuit. Il part, pour un temps, dans une ville côtière afin de proposer ses talents de sculpteur. Il se voit proposer une mission étrange : retirer le pagne d’un Christ de marbre afin de lui rendre sa nudité originelle, celle voulue par l’artiste, mort des années auparavant. Notre sculpteur va totalement s’investir dans cette tâche, au point de demander conseil à toutes sortes de personnes : évêque, rabbin, ouvrier musulman, gardien de musée, et même s’investir physiquement. Cette nudité, cette “nature exposée”, ce sexe d’homme, pour parler clairement, va occuper ses pensées jusqu’à ce qu’il accède à ce qu’il considère comme un idéal, à la fois du point de vue de la sculpture, de l’intention de l’artiste d’origine ou de sa destination à être exposée dans des lieux sacrés ou des musées. Au milieu des migrants et du pénis du Christ, une femme, rencontrée dans ce port, avec laquelle il va vivre une brève histoire qui va se terminer d’une façon totalement incompréhensible. Je pose la question ici : si l’un.e d’entre vous a lu ce roman et qu’il a compris la fin, j’aimerais que vous éclairiez ma lanterne, merci d’avance.
La plupart des critiques que j’ai lues mettent surtout l’accent sur la partie consacrée aux migrants. Or pour moi ce n’est pas le sujet principal du roman, ou alors je n’ai rien compris. Je n’ai pas saisi le lien entre les deux sujets, migrants et représentation religieuse de la nudité, bien que ce soient deux sujets intéressants à traiter. Néanmoins, la religion et moi faisant deux, voire trois… il est tout à fait possible que la totalité du propos me soit passé au-dessus du casque.
Bref, pas emballée par ce roman… Je ne demande qu’à entendre des avis divergents, des fois que l’intention d’Erri de Luca m’ait échappé !
“Je retire ma main de l’espace entre les vertèbres et la croix, là où est sculptée la courbe d’un effort pour se détacher de la position qui lui écrase le thorax. Il se cambre afin de voler la gorgée d’air nécessaire pour mourir.”