Le Centre lyrique Clermont-Auvergne a programmé cet opéra (peut-on dire que c’est un opéra ? C’est tellement plus que ça…) que, j’avoue, je ne connaissais pas. Ce qui a attiré mon attention c’est la partition de Ravel et le livret de… Colette. L’enfant et les sortilèges est sorti de l’imagination de l’immense autrice française, qui a exigé que ce soit Maurice Ravel qui en compose la musique. La Première Guerre Mondiale, la fragilité du compositeur ont retardé la réalisation de ce projet mais en 1925 il voyait enfin le jour. L’enfant et les sortilèges raconte l’histoire d’un petit garçon qui refuse de faire ses devoirs, se fait punir par sa mère et se venge sur les objets et animaux qui l’entourent jusqu’à ce que ces derniers… lui rendent la pareille et lui offrent une bonne leçon de vie. Cet opéra est un conte universel, une fable poétique autant que philosophique. On pense à Alice au pays des merveilles, au Magicien d’Oz et la mise en scène spectaculaire autant que la liberté d’écriture, tant au niveau du texte que de la musique, font inévitablement penser à ce que seront les futures comédies musicales à succès.
J’ai été subjuguée par les décors et les costumes, ainsi que par la mise en scène splendide de Bénédicte Budan. Il faut dire que le texte de Colette regorge de détails qui stimulent l’imagination. Auprès des chanteurs tantôt costumés en théière, en feu, en arbre, en fauteuil, en écureuil… évoluent des acrobates qui insufflent un rythme inattendu dans un opéra. Mon seul petit regret : que le texte ne soit pas retranscrit sur les écrans comme pour les opéras en langues étrangères. Certes le texte est en français (et un peu d’anglais) mais lorsque c’est chanté de façon lyrique, on perd la plus grande partie des dialogues.
Dans cette version de l’oeuvre, c’est un orchestre réduit à un piano (à quatre mains), des flûtes et un violoncelle qui accompagnent le conte initiatique, laissant ainsi plus de place à l’interprétation et au spectacle visuel. Le chœur et le ballet d’enfants étaient ceux du Conservatoire Emmanuel Chabrier de Clermont-Ferrand, qui ont travaillé leur rôle pendant un an avant ces quatre représentations (dont trois scolaires) : ils ont été parfaits !
Pour l’unique représentation grand public, l’oeuvre, qui ne fait que 45 mn, avait été agrémentée d’une première partie absolument réjouissante : j’ai adoré. La troupe s’est livrée à une fantaisie lyrique autour du Boléro de Ravel, une oeuvre que j’avoue ne pas apprécier beaucoup, mais qui a été revisitée avec beaucoup d’humour et de malice, sous la direction musicale d’une fillette à nattes particulièrement investie. Ensuite ce sont les enfants du chœur qui nous ont offert une parenthèse d’une immense poésie, en jouant notamment avec le lourd rideau cachant le décor de L’enfant et les sortilèges. Un rideau vivant, engloutissant les enfants, ou les enlaçant de ses pattes de velours. Un superbe moment de grâce.
Production Jeune Opéra de France / Le Théâtre du Signe
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Un grand merci à Fanny et au Centre Lyrique Clermont-Auvergne pour m’avoir permis d’assister à ce merveilleux spectacle qui était archi-complet depuis des mois.
Je vous invite à consulter les quelques dates qui restent dans l’agenda de la saison, et j’attire notamment votre attention sur le concert des 20 ans (le 5 avril) et sur la journée “Tous à l’opéra” (le 4 mai), au cours de laquelle vous pourrez – entre autres – déambuler dans l’opéra et assister à une répétition d’Orphée et Eurydice.
http://www.centre-lyrique.com/saisonlyrique/agenda-2018-2019