Le fait que Thoreau soit à la mode depuis quelques années, que ce soit pour ses textes sur la nature ou la désobéissance civile, fait que certains éditeurs se frottent les mains… et que certains lecteurs tombent dans le panneau d’une manchette alléchante.
“Les essais inédits de Thoreau”. J’avoue que je n’ai pas réfléchi longtemps lorsque j’ai lu ça sur la couverture et je l’ai acheté.
Il m’arrive rarement, et même pour ainsi dire jamais, de sauter des pages, des chapitres, ou ne serait-ce qu’un simple paragraphe. Là… j’ai sauté allègrement. Ça a été vite “lu”. Je veux bien qu’on fasse les fonds de tiroir de Thoreau pour en dénicher quelques pépites mais il s’agirait de proposer des textes présentant un intérêt pour le grand public. Je ne dis pas que les textes regroupés ici sont inintéressants ou mauvais, mais c’est juste qu’ils sont totalement hors de portée pour le commun des mortels. Le premier texte est intéressant car il est attribué au Thoreau âgé de 10 ans, une composition sur les quatre saisons. Ensuite ça se gâte. Les dissertations de Thoreau sur tel ou tel auteur n’ont d’intérêt que si l’on connaît l’auteur en question et son oeuvre. Même celle sur Homère je n’ai pas pu la tortiller. Le dernier texte sur les arbres et les incendies résonne quant à lui d’une drôle de façon avec ce que la France a vécu cet été 2022 et j’admets qu’il est porteur d’un certain optimisme résilient.
On relèvera également la présence de notes de bas de page envahissantes, recouvrant parfois les deux tiers d’une seule page. Bref, si vous faites une thèse sur Thoreau, vous pouvez acheter ce bouquin, sinon… passez votre chemin.
Bon mais j’ai quand même trouvé une jolie citation, rien que pour ça je considère n’avoir pas (trop) perdu mon temps.
“Nous sacrifions communément au souper cette heure sereine et sacrée. Nos coutumes transforment l’heure du crépuscule en un instant trivial, comme le carrefour de deux routes, l’une venant du matin, l’autre menant à la nuit. Cela pourrait être bien de prendre nos repas dehors, face au coucher de soleil et les étoiles qui montent ; s’il y avait deux personnes dont les pouls battent à l’unisson, si les hommes s’inquiétaient du cosmos ou de la beauté du monde, si les hommes étaient des êtres sociaux au sens rare ou noble du terme, s’ils étaient associés à un niveau rare ou noble, si nous accompagnions notre thé d’une larme de l’air du soir transparent et chargé de rosée, si, avec notre pain et notre beurre, nous prenions une tranche du ciel rouge de l’ouest, si la vapeur de l’urne fumante était celle d’un millier de lacs, de rivières et d’hydromel.”
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