Voilà un livre que j’avais acheté… il y a fort longtemps. Tellement longtemps qu’il n’est apparemment plus disponible à part en occasion hors de prix. Edité à l’occasion d’une exposition au musée André-Jacquemart de Paris en 2011, c’est en fait le catalogue d’exposition, le très luxueux, devrais-je dire, catalogue d’exposition. J’avais évidemment feuilleté les chapitres, pour regarder les images, mais n’avais jamais pris le temps de lire les nombreux textes d’accompagnement. C’est chose faite et quelle bêtise de ne pas l’avoir fait avant ! L’histoire de ces deux frères m’a passionnée.
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De Gustave Caillebotte, vous connaissez peut-être, et même sûrement, les Raboteurs de parquet, probablement sa toile la plus célèbre. Caillebotte était un contemporain de Monet, Degas, Pissarro… et même un ami, et même un mécène. Issu d’une famille bourgeoise à la fortune confortable, il n’hésitait pas à acheter les toiles de ses amis impressionnistes, à une époque où, on le sait, cette nouvelle approche artistique ne faisait pas l’unanimité. Gustave Caillebotte participait à certaines des expositions de ses amis, tout en adoptant un style et des compositions assez différentes, pour ne pas dire insolites pour cette époque. C’est sur cet œil novateur que cette exposition consacrée à Gustave et son frère Martial s’est penchée. Un œil photographique. En le rapprochant des prises de vue de Martial, qui ne peignait pas mais s’est très vite passionné pour cette nouveauté de la fin du XIXe siècle, la photographie.
Gustave et Martial étaient très proches, partageant même le même appartement jusqu’au mariage de Martial. Ils avaient le goût commun des rues de Paris, des portraits et du yachting. Gustave a d’ailleurs conçu lui-même les plans de nombreux bateaux sur lesquels il s’adonnait à des compétitions. Riches, les Caillebotte, mais sûrement pas oisifs, et encore moins stupides.
Martial s’est donc adonné à la photo à la toute fin du XIXe siècle, quelques années seulement avant la mort de son grand frère. On ne peut donc pas dire que les photos qu’il a réalisées étaient directement inspirées des toiles de son frère (ou vice-versa d’ailleurs) mais tout de même… il y a de nombreux points communs dans le choix des sujets et dans les compositions. Au-delà du regard purement technique sur ces exceptionnels et nombreux tirages, on reste sidéré par ces témoignages de grande qualité sur la vie de l’époque. La vie bourgeoise évidemment… les maisons familiales, le yachting, les séjours au bord de la mer, les rues de Paris… Je suis depuis longtemps fan du XIXe siècle, pour tout un tas de raisons, pour Maupassant, pour les soeurs Brontë, pour Dickens, pour les premiers polars, pour les impressionnistes, pour la Révolution industrielle, pour les débuts de la publicité, des voyages en train… Bref, cette société qui n’était pas encore tout à fait la nôtre mais qui annonçait déjà le foisonnant XXe siècle, l’élégance en plus. Ces photos me passionnent au plus haut point. Montmartre en travaux, les premiers ouvrages d’art métalliques… et les bords de Seine à Argenteuil. Ça me donne envie d’aller y flâner en lisant du Maupassant mais quelque chose me dit que pas mal de trucs ont dû changer depuis (quoique les toiles de Gustave représentent parfois les cheminées des usines).
Ce catalogue d’exposition me fait évidemment regretter de ne pas avoir vu l’expo mais la taille et le nombre et la qualité des visuels soulage grandement la frustration. On y trouve des toiles sûrement plus méconnues de Caillebotte, mais peut-être plus fidèles à ce qu’était son mode de vie et ses sujets de prédilection. On y trouve des photographies de Gustave par Martial, avec une mention spéciale pour celle dans la serre tropicale, Gustave s’étant adonné avec passion et énergie au jardinage sur la fin de sa vie. Et bien sûr cette photo devant le Louvre, haut-de-forme et chien fidèle comme accessoires.
Faudra me le prêter. J’adore Caillebotte.
Moi aussi, j’aime particulièrement Caillebotte.
J’ai eu la chance de voir la grande expo de 1994 à Paris, qui l’a fait redécouvrir en France, et j’en garde un souvenir très fort.
Suite à ton article, je viens de lire que la maison Caillebotte à Yerres avait ouvert l’été dernier après 20 ans de travaux. Non seulement on y découvre son cadre de vie, mais des expos temporaires et un immense jardin. A noter sur nos tablettes !
Ce soir sur Arte, la petite série « A musée vous A musée moi » porte justement sur le tableau des raboteurs de parquet (et sur le temps de travail). Elle est déjà visible sur leur site et c’est plutôt marrant.