Il a fallu 27 jours à Gioachino Rossini, alors âgé de 21 ans, pour composer cet opéra comique en 1813. L’intrigue d’origine met en scène le bey d’Alger qui, lassé de son épouse, cherche une belle Italienne pour la remplacer, tandis qu’il la destine, son épouse, à l’un de ses esclaves italiens Lindoro. Ce dernier n’est autre que le fiancé d’Isabella, Italienne fraîchement débarquée et qui va certes séduire Mustafa, mais surtout l’embobiner, afin de s’enfuir avec Lindoro. L’Italienne à Alger, coproduit par le Centre Lyrique Clermont-Auvergne et l’Opéra Nomade, a été revisité, pour ne pas dire dynamité, pour notre plus grand plaisir.
La mise en scène de Pierre Thirion-Vallet, directeur du Centre Lyrique (désormais intitulé Clermont Auvergne Opéra), transpose l’intrigue dans les années 1950, dans un studio de cinéma, où Mustafa est un producteur autoritaire, Lindoro et Isabella des comédiens et les autres “esclaves” les techniciens. Cette interprétation aussi créative que jubilatoire, ne peut exister sans quelques libertés, notamment au niveau des surtitrages, qui valaient à eux-seuls leur pesant de rigolade (avec en particulier quelques clins d’œil à l’actualité).
Du point de vue des costumes, la patte de Véronique Henriot, la costumière du Centre Lyrique, est indéniablement présente avec une grande élégance dans la fantaisie. La robe léopard d’Isabella est extraordinaire sur la chanteuse Maria Ostroukhova et on regrettera que la somptueuse robe pailletée de la scène d’ouverture n’aie pas connu une utilisation plus longue. Côté décor, la dernière réalisation de l’Atelier Artifice à Montferrand, imaginée par Franck Aracil, force l’admiration avec cette caméra géante qui cache à l’intérieur la loge d’Isabella.
(pour voir des photos de la costumière Véronique Henriot et de l’Atelier Artifice, je vous invite à relire mon article consacré aux coulisses de la création de Madame Butterfly, présenté début 2019)
Si la partition de Rossini est à elle-seule une débauche de fantaisie, d’onomatopées de démonstrations de virtuosité vocale, la mise en scène de Pierre Thirion-Vallet a de quoi lui répondre sans rougir. Les chanteurs nous ont régalés avec leurs nombreux déplacements, leurs chorégraphies complexes, leurs mimiques facétieuses qui transpiraient le plaisir de jouer et un amusement collectif joyeusement communicatif pour le public. L’orchestre Les Métamorphoses, emmené par Amaury du Closel, a parfaitement su s’adapter à cette débauche de folie baroque en ne forçant pas le trait mais en le soulignant avec élégance et délicatesse.
Présenté trois fois à Clermont-Ferrand, L’Italienne à Alger part en tournée en France : le 21 janvier à Abbeville, le 28 février à Neuilly-sur-Seine, le 24 mars à Poissy, le 29 mars à Perpignan et le 8 avril à Saint-Quentin.
Un grand merci au Centre Lyri… pardon au Clermont Auvergne Opéra pour l’invitation à cette belle soirée de première et surtout un grand bravo à toutes les équipes pour le travail accompli et cette production brillante.



